ABOMINATIO
Leur sang a été le premier que j'ai pu gouter, et jamais je n'en oublierai la saveur. Les domestiques et les invités suivirent. J'arpentais les couloirs du manoir, semant la mort et le sang sur mon passage. Après avoir éradiqué toute cette joyeuse assemblée, je pris un instant pour prendre un bain, changer de vêtements et préparer mes bagages. Aux premières lueurs du jour, je devais prendre une berline et fuir Arrezo. Mais une fois prête à passer la porte, les rayons du soleil m'arrêtèrent net, brûlant ma peau. Par réflexe, j'ai porté la main au crucifix qui pendait à mon cou. Après des années de dévotion et d'actes purs, j'avais été abandonnée par celui-même qui devait me sauver.
Sur les corps des miens, j'ai bâti un empire. De leur sang j'ai nourri ma colère. Et pour survivre j'ai abandonné la dernière chose qui me liait à eux. Je ne suis plus que soif insatiable et froid mordant. Une créature sans coeur.