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GENESIS

Devotio

    

  Enterrée alors que la mort n'était pas encore venue me cueillir. La terre obstruait mon nez, ma bouche et mes oreilles, je ne pouvais ouvrir les yeux ni même bouger. J'ai suffoqué jusqu'à ce que le peu d'oxygène qui restait dans mes poumons ne suffise plus et que mon coeur cesse à tout jamais de battre. Mais cette fin n'avait été que le début d'un nouvel être. Née à nouveau, dans la terre qui a enveloppé mon trépas. Ressuscitée, j’eus cette fois la force de me dégager et de creuser jusqu'à la surface. Une chance que ma sépulture fut si peu profonde. Une fois à l'air libre, je pus enfin ouvrir les yeux. Pour la première fois, j'ai éprouvé une sensation toute particulière. J'entendais tout autour de moi, le moindre animal ou insecte. Je pouvais sentir des effluves qui m'avaient été, jusque là, inconnues. Et je voyais sans le moindre mal malgré l'obscurité de cette nuit sans lune. Mais après l'euphorie vint la colère. Une rage si puissante qu'elle en avait fait trembler mon corps tout entier. Sans même réfléchir, je m'élançais en direction du manoir. Je ne savais pas exactement ce qui me poussait à rentrer. L'espoir d'y trouver ma famille ou peut-être le fait que je n'avais nul autre endroit où aller. A mesure que j'approchais de l'entrée principale, j'entendais la musique, les rires et les intonations joyeuses d'une fête.

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      Drôle de façon de célébrer la mort de leur unique fille, me suis-je dit. Le plus discrètement possible, je me suis glissée à l'intérieur, évitant soigneusement domestiques et invités. Jusqu'à arriver à la porte du bureau de mon tendre paternel. Sa voix à lui n'avait pas l'air joyeuse. Au contraire, il ruminait et tentait de réfréner quelques hurlements. Cependant j'arrivais tout de même à déchiffrer le contenu de ses paroles. D'après lui, ma naissance avait été la pire chose que cette famille ai enduré. Il aurait tant préféré avoir un petit garçon pour lui transmettre ses biens. Et là, toujours selon ses dires, il s'était retrouvé avec une petite idiote inutile sur les bras. Mais après ce déferlement de propos charmants à mon égard, il s'était félicité. Oui, félicité d'avoir eu cette idée de génie : Me remplacer par ma suivante afin que les noces soient célébrées et qu'il puisse tout de même profiter de la généreuse dot apportée par mon époux. Ah l'amour paternel... Il n'est rien de plus beau au monde. Ma mère, à qui il semblait s'adresser, restait placide. Je n'entendais que ses murmures et petits acquiescements à voix basse. Il n'en fallut pas plus pour que ma rage ne se libère et fasse pousser mes crocs et mes griffes.

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